Le loup, l’agneau et le mont Blanc
Le loup au Pays du Mont-Blanc :
aberration ou future réalité ? «Pour moi,
il ne fait aucun doute qu’il arrivera un jour
jusqu’ici. L’altitude n’est pas un
problème pour lui. La présence de l’être
humain, non plus.» Jean-Marc Landry n’entend
nullement jouer les oiseaux de mauvais augure mais, pour ce
spécialiste suisse des canidés, installé
à Servoz, cette arrivée – ou plus exactement
cette remontée – du grand prédateur est
naturelle. «Dès que le loup a été
protégé en Italie, dans les années 70, il a
commencé à rechercher de nouveaux territoires. Et il
devrait en toute logique continuer à se disperser. Le loup
ne connaît pas de frontières et une meute pourrait
très bien installer son territoire dans une région
à cheval sur la Suisse, la France et
l’Italie.» Et dans cette perspective, il est
impératif d’en finir avec les conflits stériles
entre pro et anti-loups. «Chaque camp doit retirer ses
œillères pour arriver à faire la part des
choses, insiste Jean-Marc Landry. Tout en reconnaissant
que les attaques de loups peuvent être très
traumatisantes pour les éleveurs et les bergers, il faut
parvenir à appréhender l’élevage dans un
contexte global.» Le prédateur doit alors
être traité comme un «paramètre»
parmi d’autres, ce qui impose de prendre des mesures de
précaution pour la gestion des alpages (chien patou, parcs
nocturnes, gardiennage, etc.), sans que l’on puisse
néanmoins parler de solution miracle.
Prévenir pour contenir les attaques
«Dire que l’on va avoir un
berger en permanence, des chiens de protection et des troupeaux
parqués, c’est très simple sur le papier,
constate Jean-Marc Landry. Mais sur le terrain, c’est
différent. Certains dispositifs peuvent effectivement
diminuer les dégâts – comme dans les Alpes de
Haute Provence, où la prévention a payé (deux
fois moins d’attaques) – mais dans certains secteurs,
cela ne marche pas toujours.» Ainsi dans les zones
touristiques, la «peur du loup» ne doit pas être
supplantée par la «peur du patou».
Éthologiste, travaillant depuis de longues années
avec les chiens de protection, Jean-Marc Landry connaît la
problématique. «Il y a effectivement eu quelques
cas de morsure, souvent dus à un mauvais comportement des
promeneurs.» Une chose est certaine : les chiens ne
doivent pas être ni trop agressifs ni trop réactifs.
«Mais ils ne peuvent pas être non plus trop
gentils, rétorque le biologiste, car si c’est
le cas, ils se font nourrir par tous les randonneurs et ils ne
restent plus au troupeau. Avoir un chien de protection
opérationnel, c’est du travail. La première
année est souvent un peu difficile car il fait sa crise
d’ado. Mais après 15 mois, il se
stabilise.» Si certains bergers ont décidé
de franchir le pas – dans un premier temps pour contenir les
attaques de chiens errants – , leur choix n’a pas
toujours été bien compris, leurs collègues les
accusant de faire le jeu des «pro-loup». Pour Jean-Marc
Landry, il est nécessaire de rétablir le dialogue
entre toutes les parties. «Il faut arrêter de
mettre le loup sur un piédestal ou d’en faire un bouc
émissaire, en le rendant responsable de tous les
problèmes de l’élevage. Personnellement, cela
ne me pose pas de problème que les loups qui commettent des
dégâts soient abattus. Mais encore faut-il que les
tirs soient ciblés. Si une meute est complètement
déstructurée, cela risque encore d’augmenter
les dégâts car les jeunes n’auront plus de
repères et tueront "au plus facile".» La question
n’est pas simple mais il s’impose désormais de
trouver un juste milieu, pour que ce retour naturel du loup soit
vécu le plus «sereinement» possible.
Aux Glières et dans le Chablais
La Haute-Savoie compte au minimum un loup, sur le plateau des Glières : la louve Monica. Des attaques (suspicion chien ou loup) ont également été effectuées au col de la Colombière. Dans le Chablais valaisan, la présence d’au moins une louve est avérée. Côté italien, dans le parc du Grand Paradis, un individu se serait installé alors qu’un autre serait aperçu occasionnellement dans le Val d’Aoste. Au Pays du Mont-Blanc, l’hiver dernier, des conducteurs de ratracks auraient vu un loup dans le secteur de Saint-Gervais et du Mont-Joly. Mais il s’agit de simples supputations. Pour établir à 100% la présence du prédateur sur une zone, il convient en effet d’apporter une preuve scientifique validée par une étude génétique (réalisée sur une crotte, sur des poils…). En cas d’attaques sur un troupeau, la prudence est de mise car certains grands chiens (type husky) ont le même type de morsure que le loup et le même mode opérationnel, celui du «surplus killing» : tant qu’il y a des mouvements dans le troupeau, le chien ou le loup continue à tuer.
Photos : Jean-Marc Landry
Un «petit» gabarit
Le loup rencontré «chez nous » est d’un petit gabarit (la femelle pèse en moyenne 25 kg et le mâle 35 kg). Il vient d’Italie d’où il n’a jamais disparu. Les individus isolés sont des disperseurs. Ils partent s’installer sur un nouveau territoire en attendant qu’un autre congénère croise leur chemin . Ils peuvent ainsi rester plusieurs années avant de se reproduire.
Entre chiens et loups
Auteur de plusieurs ouvrages sur le loup (dont un paru aux éditions Delachaux & Niestlé ), le biologiste Jean-Marc Landry travaille avec les éleveurs pour la mise en place de chiens de protection. Il organise également des voyages d’observation des loups sur le terrain, notamment en Espagne dans la région de la Sierra de la Culebra, à la frontière portugaise. Prochaine session en septembre : renseignements www.canis-ovis.com
sur le loup en val d'aoste, j'en vu deux fois deux debut mai 2008. Le deuxieme soir l'un deux m'a approché à environ 5 m avant de me découvrir. J'ai environ 20 photos dont quelques une plein cadreAmicalement