Passy - N°116 - Avril/Mai 2014

Patrick Kollibay : «Passy souffre d’un déficit d’image. Nous devons vraiment mettre en évidence tous nos atouts touristiques» 

«Tradition» oblige, le scrutin passerand a vu pléthore de candidats : 6 listes (3 DVG et 3 DVD) au premier tour et 5 au 2nd tour. C’est finalement celle emmenée par Patrick Kollibay qui s’est imposée avec 29,56 % des voix.

JdP – Avec 6 listes en présence au premier tour et 5 au deuxième, les électeurs passerands ont eu l’embarras du choix pour ces municipales. La vôtre a obtenu 29,56 % des suffrages. Est-il compliqué de «prendre le pouvoir» dans ces conditions ?

Patrick Kollibay – Il faut quand même préciser qu’au cours de la campagne, nous nous sommes vus avec les deux autres têtes de liste DVD. Maintenant chacun a l’interprétation qu’il veut bien en faire. Mais on ne peut pas revenir dessus car «c’est fait». Je ne critique personne. Je n’ai pas fait cette campagne contre un candidat ou contre un programme. Notre attitude n’a pas changé du début à la fin. Moi je n’ai qu’une parole. Si je ne la respectais pas, je ne pourrais plus me regarder dans la glace. C’est peut-être l’esprit militaire...

Un milieu que vous connaissez bien puisque vous y avez fait toute votre carrière. Brossez-nous les grandes lignes de votre parcours.

Je suis installé à Passy depuis 1984. J’ai été muté ici après avoir été pendant sept ans à la Garde républicaine, à Paris. J’ai dans un premier temps été affecté à la Cie de gendarmerie de Chamonix, au sein de la brigade de Passy-Chedde. En 1992-1993, je suis allé au peloton autoroutier du Fayet, puis quelques années plus tard j’étais de retour à la brigade passerande pour commander. Ensuite, en 2006, j’ai pris la tête de la brigade de Chamonix – d’abord comme commandant puis comme adjoint. Et cela jusqu’en 2012. Le tout ponctué par différentes missions à l’étranger : ex-Yougoslavie, Liban, Djibouti (service militaire).  

A 58 ans, vous êtes aujourd’hui retraité de la gendarmerie mais tout jeune «politicien». Quelle a été votre motivation première pour vous lancer ?

Avant tout participer à la vie de ma commune. Je me suis déjà investi pour le public en tant que fonctionnaire de la gendarmerie. Je connais bien la population – pour avoir travaillé avec elle – mais aussi le territoire. Donc ce mandat s’inscrit un peu dans la continuité de cette action publique. Avec une différence de taille toutefois, quand vous portez un uniforme vous avez une certaine autorité. Alors qu’en tant que premier magistrat d’une commune, la rigueur n’est pas la même. Maintenant est-ce que l’on peut vraiment parler de «politique» au sens classique du terme ?

... En tout cas, vous aviez l’investiture UMP-UDI.

Nous savons qu’avec un soutien politique affiché, quand vous avez des dossiers à monter, ils  peuvent être pris en considération plus rapidement. C’est la raison pour laquelle notre liste a demandé et obtenu cette investiture. Les députés Sophie Dion et Bernard Accoyer nous ont soutenus. Tout comme l’ancien maire de la commune, Gilles Petit-Jean.

Cela signifie-t-il que vous vous inscrivez dans la continuité par rapport au travail effectué par la municipalité précédente ? 

Nous allons essayer de finaliser certains projets en cours, comme La Ravoire. Nous allons reprendre contact avec les investisseurs qui s’étaient déjà positionnés. Parmi les dossiers prioritaires figure celui de la réforme des rythmes scolaires. Nous devons rapidement déterminer ce que nous allons mettre dans les 45 minutes de temps périscolaire. Il ne faut en aucun cas que cela devienne de la «garderie». Nous allons nous appuyer sur des gens, des associations qui ont les qualifications nécessaires, que ce soit dans le domaine artistique, sportif ou culturel.

Dans quelle situation financière est aujourd’hui la commune ? 

Nous avons évidemment des remboursements d’emprunts. L’équilibre est suffisant pour qualifier nos comptes de sains. Mais nous ne pourrons pas nous lancer dans de gros investissements si nous ne faisons pas appel à des fonds privés, à des investisseurs extérieurs. Toutes les pistes sont ouvertes. Par exemple, il y a un projet d’hôtel juste avant Quechua. Il pourrait être érigé sur un terrain communal. Passy est une commune particulière, difficile à gérer parce que chaque quartier a l’impression d’être «délaissé». Il faut donc prendre les choses étape par étape.

Et aussi étage par étage (Plaine, Chef-lieu, Plateau d’Assy, Plaine-Joux). Quelles sont vos ambitions pour le «rez-de-chaussée» ? Dans votre programme vous avez notamment mentionné un projet de nouvelle zone industrielle.

Il y a des terres qui appartiennent effectivement à la commune mais aussi à l’Etat et à des privés. La superficie totale tourne autour de 12 ha. C’est toute une bande qui se trouve derrière le paint-ball. Une chose est certaine, pas question de déborder sur les zones agricoles actuelles. Qui plus est, il faut que nous étudiions aussi la question avec le SM3A. Cette zone industrielle n’est toutefois pas une priorité. Nous nous saisirons du dossier si nous avons des demandes d’installation. 

Quid du plan d’eau ? Après l’aménagement des parkings, d’autres nouveautés sont-elles à l’ordre du jour ?

Les touristes et les gens du coin apprécient ce cadre superbe et nous tenons à préserver ce côté épuré, sans mettre des infrastructures à outrance, qui risqueraient de dénaturer le site. Mais peut-être les aménagements actuels ne répondent-ils pas suffisamment aux attentes de la clientèle. Nous ne sommes pas opposés à des équipements sportifs et ludiques supplémentaires. Mais il faudrait qu’ils soient démontables et pas trop imposants. Toujours dans le secteur, nous pensons qu’il serait aussi opportun d’aménager un itinéraire en parallèle de l’autoroute. Ce qui permettrait de relier Sallanches sans avoir à passer par les passages à niveau. Cette nouvelle voie de circulation est déjà inscrite au PLU. Nous possédons une partie des terrains, mais l’autre appartient à des privés. 

Non loin du lac, le chantier du «camp de base» de Quechua a repris son cours après moult péripéties. 

L’ouverture est annoncée pour 2015. Il est notamment prévu que l’office de tourisme y ait un point d’accueil décentralisé. Quechua mettra à notre disposition – moyennant location – un local afin que nous y aménagions une antenne décentralisée de l’OT. Mais ce point pourra également servir aux autres communes du Pays du Mont-Blanc si elles le souhaitent. Nous devons encore en discuter avec elles. Cet accueil décentralisé permettra aux personnes qui sortent de l’autoroute de s’informer dès leur arrivée. Il devrait y avoir une mixité d’accueil, avec à la fois du personnel présent certains jours, à certaines heures et le reste du temps des tablettes numériques, avec une borne à l’extérieur. Le but de l’OT est d’aller vers le public plutôt que d’attendre que le public vienne vers lui. C’est la raison pour laquelle, en été, il est prévu qu’une stagiaire mobile officie autour du lac et qu’une antenne soit aussi opérationnelle à Plaine-Joux. 

Parlant de la station de Plaine-Joux, le site est magnifique. Et pourtant le développement touristique – surtout hivernal – se fait attendre. Qu’est-ce qui freine ?

La volonté des élus. Je ne dis pas que ceux qui étaient avant moi ne voulaient pas le faire, je ne me permettrais pas de les juger. Mais depuis trente ans que je suis sur le secteur, je me rends compte que les aménagements effectués sont loin d’être suffisants. Pour ce qui est du domaine skiable, nous ne pourrons guère faire plus, de par la configuration de la chaîne des Fiz. Mais si nous pouvions un jour avoir un télésiège là-haut... Seuls nous ne pouvons pas nous le permettre car l’investissement est de plusieurs millions d’euros. Mais l’idée serait de faire appel à un gestionnaire extérieur. Nous comptons parmi les membres de notre équipe Olivier Vezinhet, qui est le n° 3 de la Cie du Mont-Blanc. Il va prendre en charge ce dossier. Nous allons lancer une étude sur les possibilités de développement de la station, qui fêtera d’ailleurs ses 50 ans d’existence en 2015. Nous organiserons des festivités à cette occasion, avec un beau programme d’animations. Cet hiver, parmi les nouveautés initiées, le ski nocturne a très bien marché. Chaque session a drainé plusieurs centaines de personnes. Nous devons continuer sur cette voie. 

Toujours dans ce secteur, l’idée d’aménager un pont himalayen a également été esquissée. On la doit à votre adjoint et président de l’OT, André Payraud. De quoi s’agit-il ?

Il s’agit d’un pont du même type que celui qui permet de rejoindre le glacier de Bionnassay, sur la commune de Saint-Gervais. Nous pourrions l’installer sur l’ancienne route d’accès au Lac Vert. Aujourd’hui elle est fermée aux voitures et aux piétons car le torrent du Nant Bordon a ravagé une partie du cheminement. L’idée serait donc de remettre en état l’itinéraire avec un accès par ce pont himalayen, qui serait installé en bordure de zone rouge – et non pas dans la zone rouge comme on a pu l’entendre... Mais ce n’est pas un projet prioritaire. L’urgence pour le développement de Plaine-Joux, c’est de permettre aux visiteurs de rester sur place. Nous sommes dans une station familiale par excellence. Mais une fois que vous partez du domaine skiable, il n’y a plus rien. Comment voulez-vous que les gens séjournent là-haut ? Il n’y a pas de réelles infrastructures hôtelières, même en redescendant au Plateau. Il faut vraiment essayer de trouver des solutions de ce côté, tout comme il nous faut communiquer ! La station souffre d’un déficit d’image. Par exemple, quand les gens sortent de l’autoroute, les seules directions indiquées au rond-point sont Sallanches et Saint-Gervais. A gauche, vous ne savez pas où vous allez ! C’est surprenant. Pourquoi ce giratoire n’est-il pas aménagé de manière plus agréable afin que les automobilistes aient l’impression d’arriver dans un endroit où l’on peut voir ou faire des choses ? Il y a un manque d’identification sur la destination touristique Passy. Il faut vraiment que nous mettions en évidence tous nos atouts.

Parmi les sujets qui fâchent : la dégradation de la qualité de l’air. Passy est en première ligne quand surviennent les pics de pollution. Malgré la mobilisation des élus du Pays du Mont-Blanc dans leur ensemble, malgré quelques «mesurettes» (diminution de la vitesse, fonds air bois…), la situation n’évolue guère. Ce qui ne semble pas émouvoir les instances étatiques.

Tout le monde est en colère parce que rien ne bouge ! On a beau parler du PPA. C’est bien,  mais s’il n’est pas mis en application... Il est vrai que la configuration du fond de vallée ne permet pas à la pollution de se dissiper. Et malheureusement toutes les particules s’accumulent chez nous. Tous les moyens d’information sont-ils suffisants quand il y a des pics de pollution ? Peut-être faudrait-il cibler plus efficacement les habitants qui ont des foyers ouverts. Mais en même temps, quand il fait froid, il faut bien que les gens se chauffent.  Le fonds «air bois», c’est bien. Mais les 1 000 € de prime pour renouveler son poêle sont absorbés par la main-d’œuvre du professionnel. Donc changer son installation n’est pas à la portée de tous. Concernant la circulation automobile, il faut tout mettre en œuvre pour favoriser le covoiturage. Avec les responsables de la société ATMB, nous allons essayer de  développer une zone dédiée, comme celle de Scionzier. Nous avons également prévu un site Internet «passycovoiturage», où les gens peuvent s’inscrire et consulter les offres de trajets. Sur ce type de dossier, il est impératif de jouer collectif. C’est d’ailleurs un sujet dont devrait s’emparer la Communauté de communes Pays du Mont-Blanc. 

Parlant de la CdC PMB, vous souhaitez que Passy ait enfin la place «qu’elle mérite». Avez-vous l’impression que la commune a été «oubliée» par le passé ?

Dans cette Communauté de communes à 10, il y a deux grandes communes – Sallanches et Passy – et d’autres, plus petites, mais qui ont plus de notoriété. Passy aurait très bien pu revendiquer la présidence en fonction de sa population, par exemple. Dans une Communauté de communes, c’est en général la commune la plus importante de l’ensemble qui prend les rênes. Donc j’avais laissé entendre que si Georges Morand, le maire de Sallanches, ne se présentait pas, je le ferais. Mais étant donné qu’il est candidat... Sur un plan intercommunal, nous voulons simplement que toutes les décisions ne soient pas orientées vers les autres communes. Il faut que Passy s’impose un peu plus par rapport aux projets que nous pourrions mettre en œuvre sur notre territoire.  

Quel est votre mot d’ordre à l’entame de ce premier mandat ?

Faire en sorte que tout ce que nous entreprenions soit pour le bien-être de la population de Passy. Dans cette aventure, il n’y a aucun intérêt personnel en jeu. Ce n’est pas la peine de dire si on n’est pas capable de faire. Notre ambition première est donc de bien travailler !

 

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